« Autrefois, au temps des guerres, un petit orphelin passait son temps à garder les rennes. Bien entendu ses maîtres ne faisaient pas paître le troupeau. Ils ne s’entraînaient pas. C’est pourquoi, mus par la peur des ennemis, ils laissaient toujours le petit orphelin garder seul les bêtes. L’enfant avait un petit renne familier. Quand ils étaient au pâturage, le petit renne disait à son jeune maître transi de froid :
– Viens ici, place-toi dans mon ventre.
Il se glissait dans son ventre et se réchauffait… »
« Тэленъеп а’ӄальыльанма ӄол ейвэлӄэй тэмпэнин ӄорагынрэтыльо лынъё. Ӄэлюӄ-ым чинит выёльыт тэӈлюнчейвыткутэ, люӈилюльэтэ гитлинэт, йыӄӄэй амайылга а’ӄальэты таӈӄонпы амынан ейвэлӄэй рыюльу нылгыӄин. Наӄам ейвэлӄэйин гатвален вэнӄааӄай. Рыёнвык вама ӄонпы вэнӄааӄая ӄивъельын нинивӄин:
– Вай ӄыетги, гымык нанӄычыко ӄынъэлги.
Нытлыӄэн нанӄычыко, номавӄэн. »
(source : charles.weinstein.free.fr)
Ce récit que l’on doit aux collectes de Charles Weinstein, nous conduit au cœur de la Tchoukoutka (Чукотка), à l’extrême nord-est de la Russie. Nous voici en effet parmi les Tchouktches dont la langue sibérienne appartient à la famille tchoukotko-kamtchatkienne. Bien qu’elle soit toujours en usage, le russe tend à prendre une place de plus en plus accentuée, de moins en moins d’enfants apprenant le tchouktche comme langue maternelle. Plus largement, V. Zadorine écrit : « Les peuples du Grand Nord russe ont perdu en un bref laps de temps tout ce qu’ils avaient acquis au cours des siècles, y compris leur mémoire historique et leurs connaissances traditionnelles » (source: sorosoro.org) Selon l’UNESCO, le tchouktche est une langue « sévèrement en danger ». Cette situation est hélas partagée par de nombreuses langues à travers le monde. Bien que les estimations varient considérablement, les plus pessimistes estimant qu’elles peuvent atteindre jusqu’à 50 % des langues existantes, il est certain qu’une menace plane sur la richesse linguistique. « L’Atlas UNESCO des langues en danger dans le monde vise à susciter une prise de conscience de la part des autorités, des communautés de locuteurs et du public en général à propos des menaces pesant sur les langues et du besoin de sauvegarder la diversité linguistique mondiale… » Une évaluation de cette vulnérabilité suit le schéma ci-joint.
En 2009, l’UNESCO déclarait : « plus de 200 langues se sont éteintes au cours des trois dernières générations, 538 sont en situation critique, 502 sérieusement en danger, 632 en danger et 607 vulnérables. » Faut-il sauver le tchouktche ? Le peut-on ?
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