Les « Cinq Empereurs » (五帝, Wǔ Dì) désignent, dans la tradition chinoise, cinq souverains mythiques ou semi-légendaires ayant régné sur la Chine avant l’établissement de la première dynastie historique, les Xia (夏朝, Xià Cháo, vers 2100 av. J.-C.). Situés chronologiquement après les « Trois Augustes » (三皇, Sān Huáng) et avant Yu le Grand (大禹, Dà Yǔ), fondateur des Xia, ces figures incarnent les idéaux du gouvernement vertueux, de l’ordre cosmique et de la civilisation en formation. Leurs règnes auraient eu lieu entre environ 2850 et 2200 av. J.-C., dans des régions correspondant à l’actuel bassin du fleuve Jaune (黄河, Huáng Hé), entre 34°N – 113°E et 40°N – 117°E. La liste classique des Cinq Empereurs, fixée surtout sous les Han (汉朝, Hàn Cháo), comprend : l’Empereur Jaune (黄帝, Huáng Dì), considéré comme l’ancêtre de la nation han, inventeur supposé de l’écriture (文字, wénzì), de la médecine (医术, yīshù) et de la guerre ordonnée (兵法, bīngfǎ) ; Zhuanxu (颛顼, Zhuān Xū), son petit-fils, associé à la consolidation du pouvoir céleste (天权, tiānquán) et à l’interdiction des mariages consanguins ; Di Ku (帝喾, Dì Kù), père de plusieurs héros culturels, promoteur des rituels (礼仪, lǐyí) et de la musique (音乐, yīnyuè) ; Yao (尧, Yáo), modèle de vertu (德, dé) et d’humilité, qui aurait abdiqué (禅让, shànràng) en faveur d’un homme méritant ; et enfin Shun (舜, Shùn), ce dernier homme vertueux, né dans une famille pauvre et maltraité par ses proches, devenu symbole d’obéissance filiale (孝, xiào) et de mérite. Leurs biographies, notamment décrites dans les Mémoires historiques (史记, Shǐjì) de Sima Qian (司马迁, Sīmǎ Qiān, vers 100 av. J.-C.), articulent mythe, moralité confucéenne et narration protohistorique. Ils sont souvent liés à des innovations majeures : calendrier (历法, lìfǎ), irrigation (水利, shuǐlì), musique rituelle, hiérarchies sociales (等级制度, děngjí zhìdù) ou fondements d’un État structuré. L’Empereur Jaune, par exemple, est associé à la boussole primitive (指南车, zhǐnán chē), aux vêtements en soie (丝衣, sīyī) et aux rites d’offrande aux cieux (祭天, jì tiān). Ces souverains représentent non un pouvoir dynastique mais une série de figures idéales, souvent utilisées par les lettrés comme archétypes du souverain juste, éclairé par le Mandat céleste (天命, tiānmìng). Leur localisation symbolique dans le Nord de la Chine reflète la construction d’un récit national centré autour du fleuve Jaune comme berceau de la civilisation chinoise. S’ils échappent à la vérification archéologique stricte, les Cinq Empereurs constituent néanmoins un pilier de la mémoire culturelle chinoise, nourrissant jusqu’à nos jours l’iconographie impériale, les discours politiques et les rites d’État, en tant qu’ancêtres fondateurs d’un ordre moral autant que politique.
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3000-2000Chinecinqempiremythe