S – Eh bien donc ! repris-je, jetons par la pensée les fondements d’une cité ; ces fondements seront apparemment, nos besoins.
A – Sans contredit.
S – Le premier et le plus important de tous est celui de la nourriture, d’où dépend la conservation de notre être et de notre vie.
A – Assurément.
S – Le second est celui du logement ; le troisième celui du vêtement et de tout ce qui s’y rapporte.
A – C’est cela.
S – Mais voyons ! dis-je, comment une cité suffira-t-elle à fournir tant de choses ? Ne faudra-t-il pas que l’un soit agriculteur, l’autre maçon, l’autre tisserand ? Ajouterons-nous encore un cordonnier ou quelque autre artisan pour les besoins du corps ? – Certainement. – Donc, dans sa plus stricte nécessité, la cité sera composée de quatre ou cinq hommes.
A – Il le semble.
S – Mais quoi ? faut-il que chacun remplisse sa propre fonction pour toute la communauté, que l’agriculteur, par exemple, assure à lui seul la nourriture de quatre, dépense à faire provision de blé quatre fois plus de temps et de peine, et partage avec les autres, ou bien, ne s’occupant que de lui seul, faut-il qu’il produise le quart de cette nourriture dans le quart de temps des trois autres quarts, emploie l’un à se pourvoir d’habitation, l’autre de vêtements, l’autre de chaussures, et, sans se donner du tracas pour la communauté, fasse lui-même ses propres affaires ? […]
Auteur : Platon
Source : La République