[…] cette découverte est presque de l’espèce que j’appelle serendipity, un mot très expressif que je vais m’efforcer, faute d’avoir mieux à vous narrer, de vous expliquer : vous le comprendrez mieux par l’origine que par la définition. J’ai lu autrefois un conte de fées saugrenu, intitulé Les Trois Princes de Serendip : tandis que leurs altesses voyageaient, elles faisaient toutes sortes de découvertes, par accident et sagacité, de choses qu’elles ne cherchaient pas du tout : par exemple, l’un des princes découvre qu’une mule borgne de l’œil droit vient de parcourir cette route, parce que l’herbe n’a été broutée que sur le côté gauche, où elle est moins belle qu’à droite – maintenant saisissez-vous le sens de serendipity ? L’un des exemples les plus remarquables de cette sagacité accidentelle […].
Par : Horace Walpole
Découverte fortuite ou réalisation inattendue d’une chose précieuse alors que l’on cherchait quelque chose d’autre. Concept qui met en avant les découvertes accidentelles et les heureux hasards. La sérendipité peut jouer un rôle important dans la créativité, la science, la recherche et d’autres domaines, où des résultats positifs surviennent de manière imprévue. Elle souligne la capacité à tirer parti des opportunités inattendues et à trouver de la valeur dans des circonstances qui n’étaient pas planifiées. La sérendipité est souvent associée à une ouverture d’esprit et à une curiosité qui permettent de reconnaître et d’apprécier les découvertes fortuites.
Mis à toutes les sauces, plus ou moins heureuses, le terme /sérendipité/, bien qu’il date déjà de quelques siècles, a indéniablement vu sa popularité augmenter tout au long des dernières années. Rappelons au passage que l’on en doit la création durant le 18e siècle à un certain Horace Walpole (1717–1797) dont le génie fut de reprendre une des appellations de Sri Lanka (Serendip) retenue dans un conte persan : « Voyages et aventures des trois princes de Serendip ». Dès le départ, le terme en vient à désigner toute « découverte inattendue, faite par accident ». Il conservera ce sens dans ses évolutions successives, tout en suscitant çà et là d’autres termes comme « fortuité », « zadigacité » et autres « cinghalisme » tandis qu’un antonyme, celui de « zemblanité » naîtra sous la plume de William Boyd. De quoi inviter à une série de néologismes plus ou moins opportuns. Quid par exemple de l’adjectif ? Opterons-nous pour un « sérendipitaire » ? Préférerons-nous un « sérendipitif » ? Parlerons-nous de « sérendipitibilité » ou de « sérendipitisme » pour désigner l’aptitude ou la disposition qui l’autorise ? Et que dire des protagonistes eux-mêmes ? Seront-ils/elles « princes et princesses de Serendip », « sérendipitistes » ou encore « sérendipiteur/es (euses ?) » De quoi nourrir tout un champ sémantique dont nous verrons bien s’il contribue ou non à éclairer notre chemin d’indispensables innovations conceptuelles…