Les Basques ont aimé et adopté le rugby, ce jeu qui n’avait rien à voir avec le Sud-Ouest a bien pris, parce que les Basques se le sont un peu approprié, étant donné la magie qu’il détient. À ce sujet, Michel Serres a fort bien conté cela. Il disait… Tout enfant, j’ai aimé à Agen le rugby, et j’ai joué avec mes petits camarades en sortant de l’école. On prenait le béret de l’un d’entre nous, que l’on tordait pour en faire une boule et on partait en courant et on se le passait. Naturellement le béret en souffrait beaucoup, et celui dont on avait pris la coiffe aurait des explications a donner en arrivant chez lui. On le faisait aussi avec le cartable quand il n’était pas trop plein. En tout cas, un endroit où on n’allait jamais, c’était le terrain, le vrai terrain de rugby où seuls les vrais joueurs de l’équipe d’Agen avaient le droit de jouer. Et un jour, nous sommes arrivés là, je ne sais pas comment, nous étions une cinquantaine de gamins sur le vrai terrain. Pas du tout séparés en équipe, pas du tout avec des maillots ! Nous étions cinquante gosses là et quelqu’un à jeté au milieu de cette foule, un vrai ballon ovale… Les enfants ont couru dans tous les sens, fous de joie. À un moment, le ballon, avec ses rebonds bizarres que lui permet sa forme tout aussi bizarre, est arrivé dans mes mains. Alors je l’ai pris, je l’ai serré contre mon cœur, et j’ai couru, couru, couru, couru, vers l’embut qui était là-bas et derrière moi il y avait cette foule hurlante de gosses qui me poursuivaient et je courais, je courais, je courais, je me suis écroulé de l’autre côté et j’ai posé le ballon. À ce moment là, j’ai su que j’étais immortel …. Personne n’a dit ça du rugby. Je crois que les Basques cherchent cela dans le sport, dans la façon de jouer, dans la brutalité, avec cependant cette notion de respect de l’autre. L’approche de l’autre, l’approche de l’immortalité.
Auteur : Jean Suhas
Pantopique(s) lié(s) :
rugby