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L’invention du marathon

Lorsque Pierre de Coubertin conçoit les Jeux olympiques modernes de 1896, il cherche à leur donner une « saveur antique ». Le célèbre linguiste Michel Bréal, qui a en tête le poème Pheidippides de Robert Browning publié en 1879, lui conseille alors d’organiser une course de Marathon à Athènes, pour reproduire le trajet du soldat qui aurait apporté en 490 av. J.-C. la nouvelle de la victoire des Athéniens et des Platéens face aux Perses. Le thème, particulièrement dramatique, est célèbre à cette époque. Des peintres l’ont représenté tout au long du XIXe siècle, à l’image de Luc-Olivier Merson qui livre en 1869 une composition saisissante. Coubertin reprend alors l’histoire que raconte Lucien de Samosate dans le traité Sur une faute commise en saluant[1], qui daterait des années 175-190 ap. J.-C. : le soldat Philippidès aurait couru de la plaine de Marathon, au nord-est de l’Attique, jusqu’aux portes d’Athènes, où se trouvaient les archontes, pour déclarer : « Réjouissez-vous, nous sommes vainqueurs ! » (chairète, nikômen). A ces mots, il aurait expiré (…) Lucien de Samosate rédige son traité plus de six cents ans après les faits. La seule source contemporaine, Hérodote (qui rédige l’Enquête tout de même cinquante à soixante ans après la bataille), raconte une tout autre histoire. Philippidès (ou Pheidippidès selon certains manuscrits) est décrit au contraire comme étant le coureur qui va chercher de l’aide auprès des Spartiates avant l’affrontement : ceux-ci, en pleine fête religieuse des Carneia en l’honneur d’Apollon Carneios, auraient déclaré ne pouvoir se joindre aux Athéniens qu’après la pleine lune. L’hémérodrome Philippidès (littéralement « celui qui court en un jour ») aurait ainsi parcouru le trajet entre Marathon et Sparte, long d’environ 250 kilomètres, en un jour et une nuit. Philippidès n’est donc pas le soldat qui annonce la victoire après le combat : un tel individu n’existe pas dans l’œuvre hérodotéenne…

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