Le langage que nous utilisons est ce qui doit nous permettre de nous exprimer de manière à être compris. Nombreuses sont pourtant les occasions où nous sommes obligés de reprendre nos paroles car elles ne correspondent pas à ce que nous pensions et voulions dire. Et pourtant, c’est nous-mêmes qui avons choisi les mots employés. Est-ce à dire que le langage peut trahir la pensée ? Trahir, c’est d’abord décevoir une relation de confiance. Si le langage peut nous trahir, c’est que l’on a préalablement admis qu’on lui confiait la tâche d’extérioriser une pensée intime. Les mots sont-ils à la hauteur de cette tâche ? Méritent-ils notre confiance ? N’y a-t-il pas, dans la langue, une mise en forme, une rationalisation qui ne se trouvent pas toujours dans ce que nous pensons intimement ? Faut-il, alors, nous méfier du langage ? Car s’il peut nous trahir en déformant ce que nous disons, le langage peut, ce qui semble pire, nous trahir en nous faisant dire ce que nous ne voulons pas dire, parfois même ce que nous ignorons. N’est-ce pas le cas lorsque nous commettons un lapsus ? Dans les deux cas (que la trahison déforme ou révèle la pensée), cela suppose une pensée qui se serait formée en dehors du langage et avant lui. Pourtant, penser, ce n’est pas seulement ressentir intérieurement. La pensée désigne un processus de raisonnement qui permet d’agencer des propositions et des idées de manière logique. En cela, la pensée se distingue du ressenti, informe et irrationnel. Dès lors, comment pourrait-on penser en dehors du langage ? Loin de trahir la pensée, le langage n’en est-il pas la condition ?
Source : philomag.com
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