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Des sons qui cliquent…

repère(s) :sens

Il est bien des manières de produire des sons. L’une d’elles s’abstient de faire appel aux poumons et utilise différentes parties du conduit vocal. On y reconnaîtra par exemple le « bruit du baiser » bilabial, le « bruit (dental) de l’agacement » (marqué par l’onomatopée tss-tss), ou encore le « claquement de langue »… S’y ajoutent selon les cas une nasalisation, un voisement (lorsqu’il y a vibration des cordes vocales), une glottalisation (fermeture de la glotte), etc. Ainsi se caractérisent les langues dites à clics, autant de claquements sonores produits par une diminution de la pression de l’air dans le conduit vocal. Didier Demolin et Alain Ghio, chercheurs au CNRS, qui ont étudié le hadza (parlé en Tanzanie dans la Rift Valley, près du plateau du Serengeti) y ont répertorié « 65 consonnes différentes, dont une douzaine de clics ». Outre le hadza, et le sandawe en Tanzanie considérées comme des isolats, une trentaine de langues seraient réparties en trois familles, autrefois regroupées au sein de la famille khoisane : langues tuu parlées au Botswana et en Afrique du Sud, langues khoe en Namibie et dans le Désert du Kalahari, et langues juu-ǂhoan parlées au Botswana, en Namibie et en Angola. [À noter qu’en proximité de ces langues, certaines langues bantoues font elles-mêmes usage de clics. Ainsi peut-on mentionner dans le groupe des langues nguni, en particulier le xhosa, le zoulou ou encore le sotho]. Hélas la plupart d’entre elles seraient menacées ou en voie d’extinction. De quoi encourager toute initiative visant à les préserver ou mieux à les diffuser. Citerons-nous le cas de Katrina Esau, ultime locutrice du N|uu. Elle se rappelle comment après des décennies d’interdiction pesant sur sa langue, « Elsie Vaalbooi, une locutrice du N|uu, a lancé un appel à la radio locale pour que d’autres locuteurs se manifestent. Il s’est avéré qu’il y avait environ 20 locuteurs vieillissants de la langue dans la région du Cap Nord »… (https://inews.co.uk/news/world/how-one-woman-saved-south-africa-oldest-language-san-bushmen-1044641) C’est ainsi qu’Esau entendant cet appel, commença à enseigner sa langue à des élèves âgés de 3 à 19 ans, les « seuls au monde à apprendre une langue comportant 114 sons distincts, dont 45 clics, 30 consonnes non cliquables et 39 voyelles »… Entre l’implication universitaire, la publication d’un livre de contes avec sa petite-fille : !Qhoi n|a Tjhoi (« Tortue et autruche »), la reconnaissance de la reine du Nǁnǂe (N|uu) par l’Ordre national du Baobab en argent décerné par Jacob Zuma, alors président d’Afrique du sud, n’est-il pas des raisons d’espérer et d’apprendre à leurs côtés ?

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