[La pluralité des langues est un patrimoine universel, bien plus vivant qu’on ne semblerait parfois le croire. Sa sauvegarde, et plus encore sa meilleure animation illustrent bien la conscience que nous pouvons avoir de l’importance de leur diversité et de leur rôle dans la défense et le dialogue de nos identités. Et si nous y participions plus activement ?…]
Nous voici en 2017 dans l’État de Kelantan, en Malaisie péninsulaire. Une équipe de linguistes de l’université de Lund en Suède est venue y étudier la langue jahai, appartenant à la famille des langues asliennes, parlée par des populations dite Semang (aborigènes). Or voici qu’au gré de leurs investigations dans un village de 280 âmes, les chercheurs sont en devoir de constater qu’une partie de la population parle en fait une langue différente : le jedek. Des mots, des phonèmes, des structures grammaticales… ne correspondent pas à ce qu’ils sont venus théoriquement confirmer. L’étude de cette « nouvelle » langue, entendons nouvellement versée dans le répertoire universel, leur permettra d’observer que le vocabulaire lié aux notions « d’achat », de « vol », ou encore de « loi », de « tribunal »… y serait absent. Insistant selon certains sur la nature non compétitive de cette société, et sur une grande égalité de genre, cet épisode illustre à merveille combien l’aventure de nos langues ne cessera de nous émerveiller. Or ainsi que cette découverte en ouvre un nouveau chapitre, ce sont près de 5000 à 7000 autres histoires que cette aventure nous conte. Comment la vivons-nous ? Comment établissons-nous un rapport utile, constant, à cette richesse universelle ?
Tandis que notre propos vogue d’une notion à l’autre, tout en empruntant le canal commun aux cultures & aux langues, ces questions ne cessent de nous interpeller. Elles renvoient chacun.e de nous, à un contrat que nous pourrions passer avec tous ceux et celles qui en scrutent tout à la fois les composantes, les différences, mais aussi la fragilité. Plusieurs milliers de ces langues sont en grand péril et l’on comprendra aisément qu’avec leur disparition, c’est l’appauvrissement même de la culture universelle, et donc de la pensée, de la sagesse, qui se profile. Nous sommes tous et toutes des antidotes à ce déclin, pour peu que nous établissions les liens qui nous rattachent à cette incroyable richesse…
Et si l’on commençait par questionner notre indéfinition de la « langue » et du « langage » ?
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