[L’histoire qui nous a été enseignée façonne dans une large mesure notre pensée et notre relation au monde. Elle contribue puissamment à établir la paix ou à s’en écarter. Comment imaginer un enseignement pacifique de l’Histoire dans la diversité des récits et des idéologies qui les sous-tendent ?…]
« L’image que nous avons des autres peuples, ou de nous-mêmes, est associée à l’Histoire qu’on nous a racontée quand nous étions enfants… Sur cette représentation qui est aussi pour chacun une découverte du monde, du passé des sociétés, se greffent ensuite des opinions, des idées fugitives ou durables, comme un amour… alors que demeurent indélébiles les traces de nos premières curiosités, de nos premières émotions. »
Marc Ferro
Comment on raconte l’histoire aux enfants
Pour beaucoup, Hérodote (v. 480 – v. 425 av.J.-C.) peut être considéré comme le père de l’histoire. On dit de lui qu’il était un orateur de grand talent, sachant ponctuer son récit de détails utiles à la compréhension de son audience et qu’il ne manquait point de méthode. On dit aussi que sa passion du voyage lui apporta un matériau inestimable duquel il sut tirer les observations les plus fines, renforcées par sa collecte de témoignages et traditions…
Pour beaucoup, Sima Qian (v. 145 – v. 90 av. J.-C.) peut être considéré comme le père de l’histoire. On dit qu’il eut un appétit précoce pour les textes classiques, nourri sans nul doute par la fonction de son père, archiviste à la cour de Chang’an (aujourd’hui Xi’an), alors capitale de la Chine. Ce dernier tenant les registres des événements qui se produisaient dans l’empire, Sima Qian disposait d’un matériau unique et de première main…
Pour beaucoup, Ibn Khaldoun (1332-1406) peut être considéré comme le père de l’histoire. En vérité on l’a tout autant reconnu comme un des plus grands précurseurs de la sociologie et de la démographie modernes. Conseiller, ministre, il prit le temps à un âge plus avancé de rédiger une œuvre monumentale dans laquelle il expose entre autres les raisons pour lesquelles naissent et meurent les empires…
À la lumière de ces trois profils prestigieux et de leur inestimable concours, mais aussi à l’idée de tous ceux susceptibles de les y rejoindre, il est peu d’affirmer que le récit historique structure notre compréhension de l’humanité. Qu’en est-il aujourd’hui de l’enseignement de ce récit ? Qu’en est-il de la manière dont nous construisons notre futur en connaissance et reconnaissance d’une histoire plurielle, racontée à plusieurs voix de part et d’autre d’une frontière, d’un fleuve, d’un océan ? Qu’en est-il de sa propension à promouvoir notre compréhension mutuelle, à apaiser les contentieux, à dépasser les raisons de présents & futurs conflits ?
Et si l’on commençait par questionner notre indéfinition de « l’histoire » ?
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