[Toute vision du monde se détermine dans son intelligence non seulement au monde, mais à l’autre et à soi. Elle gagne à se construire dans le rapport au corps, aux sentiments, et à l’esprit. Comment y œuvrer quotidiennement ?…]
« L’intelligence : faculté de reconnaître sa sottise. »
Paul Valéry
Qu’est-ce que l’intelligence ? Il est bien des manières d’y répondre et sans doute celle proposée par Paul Valéry n’est pas la moins pertinente. Entre la désignation des facultés d’adaptation, la convocation de l’intelligence artificielle, ou encore le recours à des intelligences multiples (spatiale, interpersonnelle, corporelle, logico-mathématique…), les approches possibles ne manquent pas de variété. Comment en ce cas expliquer la difficulté à relever les grands défis de notre temps : le règlement des conflits armés, la lutte contre les discriminations, le traitement des déchets, l’éradication de la famine… ? Un déficit d’intelligence malgré la richesse d’un tel registre ? Et si nous nous risquions à demander : avons-nous posé les bonnes questions ? Ou encore, notre manière de poser les questions est-elle la bonne ?
L’histoire de l’humanité, et les voies à travers lesquelles notre questionnement a cheminé, sont assurément éclairantes. Et peut-être un petit détour par un autre aspect, celui des questions, serait-il en effet utile à l’heure où bien des réponses ne semblent pas totalement opportunes. Daniel Beresniak nous encourageait à penser que « la réponse est un moyen que la question a inventé pour se reproduire. » Voilà bien qui nous rappellera à l’ironie socratique et à cet art de la maïeutique aidant l’esprit de l’autre à accoucher. Une succession de questions qui nous amène à cheminer, et à prendre une mesure de notre intelligence… Non moins captivante est la méthode des kōan 公案, utilisé par les maîtres zen. Questions apparemment ridicules, dénuées de sens, anachroniques… visant à dérouter les voies de la logique ordinaire. « Quel est le bruit que fait le claquement d’une seule main ? » ou encore « Vois-tu cette jeune fille [parfaite inconnue] ?… S’agit-il de la fille aînée ou cadette ? »
Face à l’ampleur des problématiques contemporaines, serions-nous avisé.es de quêter de nouvelles voies de l’intelligence en osant prendre le temps de la question ? Non pas celui de réponses, a fortiori convenues, mais bel et bien de la formulation des questions valant aujourd’hui d’être posées ? Si à la croisée de bien des thèmes, certaines semblent évidentes, combien d’autres pourraient ouvrir des portes sur une créativité aussi féconde qu’urgente ?
Et si l’on commençait par questionner notre indéfinition des « facultés » humaines ?
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