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I would prefer not to

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Le premier chapitre du livre de G. Berkman, consacré au Bartleby de Blanchot, est assurément le plus passionnant. Les analyses qu’il propose, particulièrement dans L’écriture du désastre, font du mystérieux copiste une figure de la passivité, de la douce résignation en laquelle le sujet se sépare progressivement de lui-même jusqu’à se perdre entièrement dans l’inaction, puis la mort. C’est cette perte de soi qu’exprime la si célèbre formule : « je préférerais ne pas ». Formule de l’ambiguïté s’il en est, puisqu’elle n’oppose pas un refus, un « non » pur et simple, mais laisse la possibilité du oui et du non, avec l’ouverture du « I would prefer » et la fermeture du « not to ». L’emploi du conditionnel est évidemment fondamental, ainsi que la tournure légèrement précieuse de la phrase, d’une politesse et d’une douceur auxquelles l’interlocuteur a bien du mal à résister (La formule la plus banale à cet égard serait, y compris à l’époque de Melville, « I’d rather not to ».). Ainsi, pour Philippe Jaworski, « Bartleby, c’est le merveilleux mystère d’une parole qui dit en même temps presque oui et presque non. Bartleby est presque immobile, presque silencieux, presque inutile, presque mort, presque incompréhensible. Presque est le mot de la limite mouvante, de la trace qui va s’effaçant, du signe qui va pâlissant ».

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1850-1900littératurephilosophieRoyaume-Uni